Les rayonnements ionisants peuvent provoquer des maladies. Pour protéger la population et le personnel des installations nucléaires de ces effets nocifs, les doses de radiations doivent pouvoir être mesurées le plus précisément possible en tout temps.
Dans les installations nucléaires, la sécurité au travail est la priorité. Cela ne concerne pas seulement le fonctionnement des installations, mais également la protection du personnel. Les personnes qui, dans le cadre de leur travail dans des installations nucléaires, peuvent être exposées aux rayonnements doivent en conséquence porter sur elles deux appareils de mesure de doses appelés dosimètres. Les dosimètres sont régulièrement analysés et les doses accumulées sont enregistrées. Le dosimètre passif enregistre l’exposition aux rayonnements pour le registre central des doses. Le dosimètre électronique actif dispose en plus d’une fonction d’alarme. C’est la seule façon de pouvoir intervenir avant que le personnel ne soit exposé à des doses trop fortes. Lorsque la dose reçue par une personne dépasse une des limites de dose d’exposition fixées par la législation, l’autorité de surveillance décide si celle-ci doit être placée sous contrôle médical conformément à l’ art. 59 de l’Ordonnance sur la radioprotection.
En cas de dépassement, la dose effective doit être déterminée individuellement. Dans un tel cas, l’IFSN fait reconstruire la dose par des experts externes de l’IRA (Institut de radiophysique) à Lausanne. Pour plus de sécurité, une analyse chromosomique en laboratoire est par ailleurs ordonnée (voir paragraphe sur la dosimétrie biologique). Les données de la dosimétrie biologique sont communiquées à l’IFSN et à la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (Suva).
Les autorités de surveillance se basent sur ces données pour prendre des mesures telles que l’exclusion temporaire ou définitive du travail en tant que personne exposée aux rayonnements. Depuis 2009, trois cas de dépassements de limites de dose ont été signalés dans la zone de surveillance de l’IFSN. Aucune des personnes concernées n’a pour l’instant constaté de conséquences sanitaires.
Qu’est-ce que la dosimétrie biologique ?
La dosimétrie biologique intervient lorsqu’aucune méthode de mesure physique n’est disponible ou que leurs résultats sont mis en doute. Elle peut également être considérée comme un complément au dosimètre et elle est particulièrement importante lorsqu’une exposition potentielle aux radiations doit être déterminée a posteriori. Grâce à la dosimétrie biologique, on peut étudier les effets d’une (forte) dose spécifique de rayonnement sur une cellule. Elle ne permet pas seulement de détecter les éventuelles modifications induites par les radiations, mais il est même possible de tirer des conclusions sur l’intensité de la dose reçue.
Dans la dosimétrie biologique, des éléments du métabolisme ou des structures biologiques du corps humain, ou plus précisément leurs modifications suite à une irradiation, sont utilisés comme dosimètre. L’analyse des chromosomes dicentriques est utilisée comme standard mondial, surtout lorsqu’il s’agit de détecter une irradiation aigüe du corps entier. Il s’agit de chromosomes dont la forme a été modifiée par l’irradiation et qui sont facilement détectables visuellement car ils présentent deux étranglements (centromères) facilement reconnaissables. Les chromosomes intacts ne possèdent qu’un centromère, qui constitue le point de contact entre les deux bras du chromosome.
Pour l’analyse des chromosomes, on utilise des cellules sanguines à partir de prélèvements dans la veine du bras. L’analyse peut se faire manuellement par microscopie optique ou de façon automatisée. Techniquement, l’évaluation n’est pas compliquée, mais elle prend beaucoup de temps car, pour des raisons statistiques, il faut analyser un grand nombre d’échantillons cellulaires (au minimum 1000), de manière à pouvoir détecter également de faibles doses. En analysant un nombre suffisant de cellules, il est possible de détecter des doses nettement inférieures à 100 mSv. À l’aide d’une courbe de calibration, il est même possible de déduire le type de rayonnements. En plus, ces aberrations chromosomiques sont spécifiques aux radiations, ce qui veut dire qu’elles n’apparaissent pas dans le métabolisme normal ou sous l’effet d’autres facteurs tels que des produits chimiques. Cela permet de répondre à la question primordiale : « Y a-t-il eu une irradiation ou non ? »
Ceci est le quatrième de cinq articles traitant de la radiobiologie. Le dernier article se penche sur les questions actuelles de la radiobiologie.